Être maire aujourd’hui : une vocation sous pression

Dans nos communes, le maire incarne bien plus qu’un simple rôle administratif. Il est le garant du vivre-ensemble, l’animateur des projets locaux, le médiateur des conflits du quotidien. Pourtant, cet engagement total, souvent empreint d’une vraie passion pour le bien commun, devient une épreuve insoutenable pour beaucoup.

Les raisons de ce découragement sont multiples, mais une constante revient : l’exigence toujours croissante des administrés. Chaque projet, aussi modeste soit-il, semble aujourd’hui susciter son lot d’oppositions et de recours. Les nombreuses démarches judiciaires, bien que légitimes sur le principe, grèvent le budget communal et consomment un temps précieux. À l’ère des réseaux sociaux et de la judiciarisation rampante de notre société, tout se complexifie, et tout devient suspect. Le maire, parfois accusé à tort ou par simple rumeur, doit consacrer son énergie à se défendre plutôt qu’à bâtir.

Et que dire de la suspicion systématique ? Si un maire ou l’un de ses proches envisage d’acquérir un bien immobilier dans son village, les regards se tournent immédiatement vers l’ombre d’une prise illégale d’intérêts. Une situation absurde, où l’on demande à ceux qui se dévouent pour leur territoire d’y renoncer, y compris pour leur propre famille.

À cela s’ajoute le rôle de la presse, qui, par son devoir d’informer, peut parfois amplifier une controverse sans en vérifier les fondements. Un titre accrocheur ou un récit à charge suffit à ternir la réputation d’une personne dont les intentions étaient pourtant nobles. Le maire devient alors l’otage de perceptions biaisées, réduit à une caricature éloignée de la réalité.

Résultat : La fonction de maire, si belle par essence, attire de moins en moins de vocations. Qui peut en vouloir à ceux qui renoncent à se jeter dans cette arène ? Comment reprocher à un individu de préserver sa tranquillité plutôt que de se sacrifier pour une mission où l’on est à la fois taillable et corvéable, soumis aux critiques et aux ingratitudes ?

Et pourtant, cette fonction reste essentielle. Le maire est le pilier de nos démocraties locales, le visage humain de la politique de proximité. Mais pour redonner de l’éclat à cette vocation, il est urgent de changer de regard. Cela passe par une reconnaissance accrue de leur rôle, une simplification des procédures administratives, et surtout un retour de la confiance. Sans cela, les petites communes risquent de se retrouver sans pilote, et c’est toute la démocratie locale qui en pâtira.

Marie José Mialocq, Maire d’Arbonne

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